"Le Hérisson" sans élégance : de l'adaptation filmique comme un appauvrissement ?

Publié le par Kadjagoogoo

Une fois n'est pas coutume, c'est au sein même de ce blog - et plus précisément d'un intéressant commentaire qu'il a suscité, ici  -, que je puise la matière à ce nouvel article qui se veut moins une constation péremptoire que l'observation d'un phénomène récurrent (qui prêt probbalement à discussion) : les adaptations cinématographiques font la plupart du temps pâle figure au regard de leur source d'inspiration.

http://a69.g.akamai.net/n/69/10688/v1/img5.allocine.fr/acmedia/rsz/434/x/x/x/medias/nmedia/18/70/90/80/19120443.jpg
Je conçois l'apparence de lieu commun, voire de lapalissade d'une telle assertion.

Lorsque j'ai avancé, dans l'article susnommé, que Le hérisson - le film, donc - doit certainement être, à l'image de l'affablissement symbolique de son titre (tandis que l'intrigante combinaison originale - "L'élégance du hérisson" - annonçait un mystérieux programme) , bien inférieur au roman dont il est tiré, le constat peut sembler bien présomptueux quant on sait que je n'ai pas vu ledt film. Mais il se base sur la méfiance empirique que je retire du visionnage de beaucoup de ces entreprises d'adaptation, que je finis pas traiter par le mépris, les soupçonnant d'être uniquement motivées par le profit - le film tiré d'un best-seller drainera subséquemment les foules, ce genre de calcul à vocation lucrative.

 

Il est donc plus sûrement question de déception, en effet... à condition, toutefois, que l'on s'expose à telle déception ; ce qui implique que l'on ait donc un espoir, aussi mince soit-il, d'être séduit par le principe de cette adaptation cinématographique - ce qui dans le cas qui nous intéresse là, n'est pas mon cas.

 

Maintenant, je reconnais volontiers que certaines adaptations n'ont rien (ou presque) à envier à leur source littéraire ; quand elles ne les surpassent pas, comme, par exemple Dead zone, Carrie et Misery, pour citer le cas d'un auteur, Stephen King, gâté par ses émules cinéastes - à savoir respectivement David Cronenberg, Brian De Palma et Rob Reiner, soit tous trois des réalisateurs "à univers (personnel)". CQFD

 

Voire aussi le cas Peter Jackson, qui réconcilia nombre de lecteurs écoeurés de la saga du Seigneur des Anneaux avec l'univers (et en premier lieu les luxuriants décors) de La Terre du Milieu, découragés par les indigestes et ominprésentes descriptions de Tolkien, avantageusement illustrées dans la spectaculaire trilogie du Néo-Zélandais.

 

Mais rien ne vaut, assurément, les images (et les pensées) que l'on se représente soi-même, guidé et inspiré par le talent de l'écrivain, qui suggère d'ailleurs souvent plus qu'il ne montre - à l'instar de cette image bien connue de la porte qui reste finalement fermée, dans la littérature, sur le danger qu'elle dissimule, au contraire de sa déclinaison filmique, hélas trop souvent ouverte sur un monstre forcément décevant puisque concret, palpable, visible... (et là encore, je pense à l'exception qui confirme la règle, le sobre et efficace La Maison du Diable de Rober Wise, adaptation méritante du chef d'oeuvre fantastique de Shirley Jackson, Maison hantée - à l'inverse du boursouflé Hantise, son piteux et inutile remake de 1998).


J'achève ce billet en rappelant que je n'ai pas vu le film de Mona Achache dont il est pourtant beaucoup question dans cette "démonstration" (il s'agit plutôt d'une réflexion ouverte). Je ne crois pas, malgré tout, qu'il faille s'en étonner et pointer du doigt l'illégimité - voire l'ineptie - de mon propos. Ce film n'a d'autre objet, ici, que de relancer ma réflexion (et la vôtre, aussi, j'espère, sans quoi ce billet sera réellement superfétatoire - pour reprendre un terme appris avec gourmandise lors de ma lecture du Hérisson) sur le sujet, ce qui est déjà précieux en soi.

Publié dans Cinéma

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L
<br /> <br /> Café électrique : "un des plus mauvais livres qu'il m'ai été donné de parcourir"<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> > Vous avez de la chance, dans ce cas car la moyenne de vos lectures doivent être d'une qualité rare ! Ce qui est bien possible, vu le nombre de livres parfaits qui peuplent ce monde. Encore<br /> faut-il sélectionner avant, et ne pas se réserver trop de mauvaises surprises.<br /> <br /> <br /> Enfin, j'aimerai bien savoir si votre avis était (est) renforcé par le battage médiatique fait autour du livre ? Vexé de s'être "fait avoir" et de l'avoir lu alors qu'on aurait été si à l'aise en<br /> passant à côté ?<br /> <br /> <br /> Non parce que quand même, malgré les limites flagrantes de ce bouquin, il reste d'un style tout à fait correct. Loin de se retrouver si bas que vous le suggérez... Selon mon jugement de lectrice<br /> qui en a vu passer des Bien, BIEN pires.<br /> <br /> <br /> __________________________________________<br /> <br /> <br /> A propos des adaptations, qui étaient le sujet de l'article, je ne suis pas une grande cinéphile, et ne me laisse donc pas souvent entraîner à les voir. Notament par la grande crainte d'être<br /> déçue, quand ce n'est pas une certitude.<br /> <br /> <br /> Sans parler des adaptations de mangas > animés qui me font juste enrager durant quelques minutes devant la débilisation d'un manga intéressant. Quelques minutes après quoi je me dis que<br /> décidément, les animes, c'est naze ^^;<br /> <br /> <br /> (Il y a quelques très rares exceptions)<br /> <br /> <br /> Par contre j'ai lu le roman qui a inspiré la série tv : Flash Forward, car j'ai vraiment accroché (pour une fois) à la série, justement. Je me disais que comme d'habitude, j'allais découvrir du<br /> mieux encore en bouquinant. Or, c'est le roman qui paraît carrément pauvre et même un peu pataud par rapport à la série qui a extrapolé carrément avec succès. Good game pour eux.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
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C
<br /> <br /> Au dela de savoir si on doit ou non adapter un livre ( et la liste est longue des adaptations réussit, je retiendrais par exemple apocalypse now, tiré de au coeur des ténèbres de Joseph conrad )<br /> il faut surtout dire que l'élégance du herisson est un des plus mauvais livres qu'il m'ai été donné de parcourir, d'aillers c'st même pas un livre, c'est rien.<br /> <br /> <br /> <br />
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K
<br /> <br /> Bonjour et merci pour cette visite commentée.<br /> <br /> <br /> N'ayant pas encore lu (on dit ça pour les chefs d'oeuvre ) le livre de<br /> Conrad, mais au regard de son excellente réputation, j'imagine sans mal que le matériau de base qui inspira Coppola était de toute première qualité, ce qui l'aura sans doute grandement<br /> aidé/orienté dans son indéniable réussite. <br /> <br /> <br /> Votre réaction me permet de signaler, ce billet étant déjà relativement "ancien", que j'ai depuis "ontologiquement" (le terme et pompeux et sans doute mal adapté, mais je n'en vois guère d'autre<br /> en l'occurrence, au moement d'écrire ces lignes) révisé mon jugement sur le roman de Muriel Barbery, qui m'avait, je l'avoue, bluffé sur le coup - ce vocabulaire luxuriant, cette érudition (trop<br /> ?) affichée, la narration "bicéphale"... Mais plus j'y songe et plus je me dis que je ne relirai jamais ce livre. Il est très rare, d'ailleurs, que je relise un livre (cela ne m'est arrivé, je<br /> crois, que deux fois, avec des romans de Stephen King - "Rage" et "Marche ou crève", dont je me dis encore aujourd'hui que je les relirai avec grand plaisir plus tard, car ils font toujours sens<br /> à mes yeux ; il y aura aussi "Lolita" de Nabokov, que je n'avais pas terminé il y a près de dix ans : j'étais alors sans doute trop jeune pour en savourer la géniale dimension transgressive ; il<br /> me parlerait davantage, désormais...).<br /> <br /> <br /> Bref, je crois que l'effet mystificateur qu'a eu sur moi - et sur beaucoup d'autres lecteurs, apparemment - "L'élégance du hérisson" s'est dissipé avec le temps, sans que son texte ne soit<br /> évidemment modifié. Ce sera donc moi qui aura changé... évolué ?! Cela permet d'ailleurs de mesurer combien il est précieux de valider/cautionner, des années plus tard, certaines choses qui vous<br /> ont transporté - livres, films, peintures... L'art en général est un bon exemple - et qui le font toujours alors que vous avez mille fois changé depuis. Car on opère, dit-on, une révolution<br /> perpétuelle ; un phénomène sans doute accru à l'ère d'Internet qui bouscule tellement les choses, par son principe même de profusion et d'accès à la culture et à tout le reste.<br /> <br /> <br /> Ce blog me permet ainsi d'opérer une sorte de tri sélectif, très parcimonieux, certes, mais tout de même significatif dans ces choses qui me traversent et qui retombent ou non "dans la<br /> poussière". Je partage notamment ces jours-ci des coups de coeur vieux de plusieurs années - les photos de Narelle Autio, celes de David Gibson, le travail d'Erwin Olaf et celui de Jenny Saville,<br /> etc. - que j'aie la joie de reconnaître toujours "miennes", d'estimer encore autant - si ce n'est pas davantage, même.<br /> <br /> <br /> Pour revenir plus précisément au sujet qui nous occupe ici - l'adaptation filmique d'un matériau littéraire -, je profite de cette réponse à votre commentaire pour signaler l'honnête réalisation<br /> de Patrick Bouchitey, Imposture, tirée du polar de du<br /> romancier espagnol Jose Angel Manas, intitulé Je suis un écrivain<br /> frustré.Là encore, n'ayant pas lu le livre adapté, je me dis que sa qualité - le "pitch" est lumineux - a dû faciliter la tâche du cinéaste.<br /> <br /> <br /> Encore que, comme on l'a dit, de bons romans ne donnent pas systématiquement de bons films, loin s'en faut...<br /> <br /> <br /> Au plaisir de vous recroiser dans ces pages,<br /> <br /> <br /> Kadja<br /> <br /> <br /> <br />
Z
Bonjour,Et bienvenue dans la communauté tous les débats !Au plaisir de vous lire bientôt,Zoyas
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K
<br /> Merci pour cet accueil et cette visite commentée ! Au plaisir de prochains débats, donc...<br /> <br /> Kadja =)<br /> <br /> <br />
T
Une réponse qui devient article? voilà ce que j'appelle de l'intelligence et pour utiliser un terme à la mode de l'interactivité. Dire combien je suis d'accord avec ce développement serait superflu mais j'ai plutôt pour habitude de ne jamais clore tout çà fait un sujet lorsque je rencontre un interlocuteur de talent c'est pourquoi je formulerai cette question:l'approche de la littérature telle qu'elle est faite à l'Ecole ne comporte t'elle pas les mêmes défauts que le cinéma? à savoir en premier lieu un décryptage imposé d'une oeuvre? puis l'absolue nécessité de l'utiliser pour faire passer un courant de pensée? ou encore la facilité de puiser dans des poncifs? et tant d'autres lieux communs qui font perdre à toute oeuvre le principe même de sa création  et de son existance,dernière précision je laisse à chacun la liberté de répondre ou non à mes propos et de clore le débat s'il le juge préférable.
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K
<br /> Je suis flatté par un tel commentaire, qui témoigne d'un rare intérêt - notamment pour ce blog, qui aimerait être plus souvent à pareille fête !<br /> J'ai mis longtemps à vous répondre, pour diverses raisons pas toutes dépendantes de ma volonté. Mais surtout pour une : ayant très tôt été déscolarisé, je me sens mal placé pour juger les possibles<br /> limites et autres failles de l'éducation scolaire ; même si je dois bien reconnaître qu'elles m'ont sans doute, plus ou moins consciemment, détourné du système et poussé vers l'autodidaxie.<br /> <br /> N'importe comment, j'ai apprécié votre commentaire, sa grande justesse, et son absence d'affirmation catégorique. Le doute, voilà bien l'antidote à la bêtise.<br /> <br /> Merci pour cette lecture commentée.<br /> <br /> Au plaisir de vous lire ici ou là,<br /> <br /> <br /> Kadja =)<br /> <br /> <br />