Délivrance(s) pour les héros tragiques de "12 and Holding"
Le synopsis :
Suite au décès accidentel de son frère jumeau, l'introverti Jacob (complexé par une tâche de vin qui lui marbre le visage) nourrit une irrépressible soif de vengeance envers le garçon responsable du drame. A vif et obéissant ainsi à cette pulsion, aussi vindicative que sadique, il entreprend alors de le visiter régulièrement au centre de rééducation où ce dernier purge sa peine...
Leonard, quant à lui, a miraculeusement survécu à l'incendie qui causa la mort du frère de Jacob. Il ressort toutefois de l'épreuve anosmique, soit privé de l'odorat et, donc, du goût. Une altération de son quotidien a priori mineure, mais qui va pourtant s'apparenter à un véritable "effet papillon" dans l'existence de cet adolescent conditionné et adipeux qui va dès lors profiter de ce "handicap" providentiel pour rompre avec un pernicieux déterminisme familial.
A la période charnière de ses premières règles, leur amie eurasienne Malee souffre discrètement de voir sa mère en perpétuel conflit avec un père démissionnaire dont elles sont séparées. En l'absence d'une présence masculine, elle se montre sensible au contact de Gus, un patient de sa mère psy, lequel ne se doute pas de l'émoi naissant qu'il engendre bien malgré lui. Elle développe alors pour ce nouvel ami un attachement précoce, équivoque et inadéquat qui aura une conséquence inatendue...
Objet de l'affection de Malee, Gus, s'il n'est quant à lui plus un ado n'est néanmoins pas mieux loti que ces autres personnages troublés. Dans ce quartet d'individus bancals et blessés, il couve certainement la plus étouffante névrose, qui trouve sa source dans un acte terrible, commis par excès d'altruisme, qui lui vaut aujourd'hui de "vivre" avec une insondable culpabilité - d'où son analyse suivie dans le cabinet de la mère de Malee. Il est, lui aussi et sans le comprendre encore, en pleine expectative, en mal d'une délivrance.
Mon avis :
Un beau film choral, difficile à résumer - tant sa substance et son intérêt sont à chercher dans les nuances d'un scénario exigeant ; mais un film aisé à conseiller à ceux qui goûtent l'hégémonie adolescente dans les oeuvres de Larry Clark, de Todd Solondz ou de Gregg Araki, où l'impuissance et l'incompréhension caractéristiques de parents archétypaux mettent en relief la profondeur abyssale d'enfants tourmentés qu'ils méconnaissent, au monde intime d'une complexité insoupçonnée par un âge adulte oublieux. Ajouté à cela le vertige des "hasards objectifs" et autres inéluctables coïncidences (le fameux "fatum") tragiques chers aux films d'Inárritu, et vous aurez une idée de l'expérience qui vous attend avant la séance !